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Friday, February 17, 2023

ENQUÊTE FRANCEINFO. Guerre en Ukraine : formation au combat, exercices conjoints… L'activité militaire russe s ... - franceinfo

L'arrivée d'un important contingent militaire russe sur le sol biélorusse est perçue comme un indicateur de l'intensification à venir de l'offensive russe en Ukraine.

C'est un front de la guerre qui alimente les craintes d'une nouvelle offensive russe en Ukraine, alors que Vladimir Poutine s'apprête à prononcer un discours sur l'état de la nation, mardi 21 février. A l'approche du premier anniversaire de l'invasion, les menaces venant de Biélorussie se font plus pressantes. Grâce à des vidéos amateurs, des images satellite et des observateurs spécialisés, Les Révélateurs de France Télévisions ont pu documenter l'implantation militaire russe en Biélorussie, à la fois base arrière et avant-poste de Moscou dans ce conflit.

Ces images révèlent l'ampleur de cette campagne : formation au combat, exercices conjoints, renforcement de l'arsenal militaire biélorusse… Une activité intense qui interroge, d'autant que des exercices similaires avaient été observés sur le territoire biélorusse avant l'offensive de février 2022. A l'époque, la Biélorussie avait servi de base arrière à cette offensive, une partie des forces armées russes lançant l'assaut sur la région de Kiev depuis le sud du pays.

Malgré le recul des troupes russes dans le nord de l'Ukraine au début du conflit, le rapprochement entre Minsk et Moscou n'a pas cessé. Il s'est même intensifié. Le 10 octobre, la Biélorussie a ainsi annoncé la création sur son territoire d'une force militaire commune avec son allié russe. Depuis, l'organe de presse du ministère biélorusse de la Défense communique régulièrement sur les manœuvres conjointes des forces russes et biélorusses, aux frontières de l'Ukraine et de la Pologne.

Le 15 octobre, il a diffusé un reportage éloquent. Tourné de nuit, il montre l'arrivée du premier contingent militaire russe. D'après un document posté sur Telegram (en biélorusse) par la Communauté des cheminots biélorusses, les images sont tournées à la gare de Polonka, à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Minsk. Le document détaille le trajet du convoi : il est parti deux jours plus tôt de la gare de Selyatino, à la périphérie de Moscou, pour arriver en Biélorussie en date du 14 octobre.

Propriété du transporteur fédéral du district militaire ouest de la Russie, le train transportait 32 wagons de matériel militaire et huit voitures de militaires russes. Selon un décompte réalisé par France Télévisions, qui se base notamment sur les informations relayées par la Communauté des cheminots de Biélorussie sur Instagram (en biélorusse), au moins 20 convois similaires ont traversé la frontière entre le 15 octobre 2022 et le 16 janvier de cette année.

Sur place, les mouvements de troupes sont quotidiens. Et sur les réseaux sociaux, les vidéos de convois militaires circulant côté biélorusse se multiplient. Leur géolocalisation révèle une action militaire globale, aux quatre coins du pays, et pas seulement à la frontière avec l'Ukraine, comme le montre cette carte du site Belarusian Hajun (en biélorusse), un projet de surveillance de l'activité militaire russe en Biélorussie.

Capture d'écran d'une carte du site Belarusian Hajun recensant l'activité militaire russe en Biélorussie, à la date du 17 janvier 2023. (BELARUSIAN HAJUN / FRANCE TELEVISIONS)

A Baranovichi, par exemple, une ville biélorusse située dans l'Ouest, un internaute a filmé début janvier et posté sur Telegram (en biélorusse) une vidéo d'un train chargé de véhicules et d'armements militaires divers roulant en direction de Brest, à la frontière avec la Pologne. D'après les données du ministère biélorusse de la Défense relayées par l'agence de presse Reuters (en anglais) et vérifiées par France Télévisions, la Russie a déployé en Biélorussie environ 9 000 soldats depuis la mi-octobre.

Le 16 janvier, le ministère biélorusse de la Défense a annoncé l'ouverture de deux semaines d'entraînements militaires conjoints, notamment dédiés à l'aérien. Sur leurs réseaux sociaux, Minsk et Moscou se sont encore massivement vantés de ces opérations, avec des images de vols tactiques, d'exercices de défense d'une ligne de front ou de déplacements de troupes.

Au sol, les infrastructures militaires se sont aussi renforcées. Le 11 janvier, des images satellite de l'aérodrome militaire de Zyabrovka, dans la région de Gomel, dans l'extrême est de la Biélorussie, révèlent la présence de nouveaux systèmes de défense aérienne russes. Ces installations étaient toujours visibles trois semaines plus tard, comme le montrent ces images satellite de l'entreprise américaine Planet Labs.

Image satellite de l'aérodrome militaire de Zyabrovka, dans la région de Gomel, dans l'est de la Biélorussie, le 4 février 2023. (PLANET LABS)

La Russie a également doté son allié d'équipements militaires d'attaque. Le 1er février, Minsk a déclaré que ses forces armées contrôlaient désormais de manière autonome les systèmes de missiles guidés mobiles Iskander fournis par Moscou, comme le rapporte Reuters (en anglais). Ces armes balistiques de courte et moyenne portée, utilisées par Moscou en Ukraine, peuvent emporter des charges conventionnelles mais aussi nucléaires.

L'exploitation des terrains d'entraînement biélorusse devrait se poursuivre dans les prochains mois. Le 31 janvier, Moscou et Minsk ont signé un accord portant sur "l'établissement de centres d'entraînement au combat" conjoints "sur le territoire biélorusse". Et la tenue de nouveaux exercices opérationnels, baptisés "Union Shield-2023", a été annoncée pour septembre prochain.

En créant un "groupement régional de forces armées" à la frontière de l'Ukraine et de l'Otan, la Russie montre un peu plus les muscles et laisse planer le doute sur une nouvelle offensive depuis la Biélorussie. A en croire un récent point quotidien du ministère britannique de la Défense posté sur Twitter, ce scénario reste "peu probable". "Bien que la Russie maintienne un grand nombre de forces en Biélorussie, elles sont principalement impliquées dans la formation", estime Londres, balayant l'hypothèse "d'une force offensive crédible". L'institut Study of War (en anglais), spécialisé dans les recherches militaires, n'écarte toutefois pas l'hypothèse à moyen terme, le temps qu'un contingent se consolide.

De son côté, Minsk évoque une opération "purement défensive". "La décision de créer un groupement régional de troupes a été prise (…) uniquement dans le but de renforcer la protection et la défense" de la Biélorussie en tant qu'alliée de Moscou, a assuré le ministère de la Défense biélorusse dans un communiqué relayé par son organe de communication, VoenTV. Ces actions inquiètent, malgré tout, les gardes-frontières et militaires ukrainiens. Pour faire face à cette menace, les frontières avec la Biélorussie ont été renforcées avec plusieurs dizaines de tranchées.

A ce jour, un nombre limité de militaires russes ont en tout cas repris le chemin de la Russie. Selon notre décompte, seuls cinq convois ferrés et un millier d'hommes russes formés sur les terrains biélorusses ont fait le voyage retour.

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